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« Vainqueur le jour, voleur la nuit. » Pour résumer une vie bien plus complexe. Celle de Toumany Coulibaly, cinquième d’une famille malienne de dix-huit enfants, à la fois un athlète de haut niveau et cambrioleur en série. Un destin hors norme raconté avec empathie et affection par un journaliste et écrivain. Un portrait sensible par un auteur qui mêle enquête et confession intime. Car c’est finalement le livre d’une belle rencontre. «Une de celles où, tout en rencontrant l’autre, on se rencontre soi-même», a dit Mathieu Palain. À découvrir dès 15 ans.
Car ce jeune auteur déjà remarqué son premier roman Sale Gosse (2019, L’Iconoclaste), affirme son goût et son talent fou pour une littérature du réel, dans la lignée des grands journalistes écrivains. Parce qu’au-delà de son enquête sur le destin hors norme d’un athlète cambrioleur, Mathieu Palain questionne la place du journaliste, l’aveuglement possible pour son « sujet » et sa propre obsession pour le thème de l’emprisonnement. Car au-delà du fait divers, au-delà de l’enquête sur un destin hors-norme, l’auteur se raconte lui-même avec honnêteté et sensibilité. Car tout sonne vrai, juste et authentique dans ce livre où Mathieu Palain a posé ses tripes sur la table pour nous raconter ce face-à-face bouleversant. Quand la vraie vie devient de la grande littérature.
LITTÉRATURE DU RÉEL. Athlète de haut niveau au début des années 2010 — en 2015, à 27 ans, le jeune homme a remporté le titre de champion de France du 400 mètres en salle —, Toumany Coulibaly a multiplié dans le même temps les cambriolages nocturnes. Comme poussé par une pulsion irrépressible. Répondant à un appel aussi impérieux qu’indéchiffrable, même par lui. Mathieu Palain décrit ce parcours de vie qui défie les lois, la réalité, l’imagination. Il ne s’agit pas d’une double vie, vraiment. Plutôt d’une imbrication de deux réalités dissonantes qu’on n’arrive pas à aborder rationnellement. L’auteur, journaliste, enquête, questionne, ausculte, pour essayer de mieux comprendre le phénomène et nous le restituer sous forme de non-fiction sensible et empathique. Un livre que l’on sent nourri des entretiens de ‘auteur avec son sujet, mais aussi de rencontres avec ses proches, des éducateurs, des entraineurs. Le prisonnier et le journaliste y ont noué une vraie amitié.
PORTRAITS SENSIBLES. On sent une affection réelle entre l’auteur et l’athlète. Nés tous deux en 1988, dans la même banlieue parisienne, fous de sport. Mathieu Palain a rencontré Toumany Coulibaly à de nombreuses reprises au parloir. Il l’a vu, revu, écouté remonter le fil de son histoire dont il n’arrive pas à effacer ni la honte ni la culpabilité. On ne peut pas passer à côté de la proximité entre ces deux exacts contemporains, à tel point qu’ils finissent par être deux à se partager le premier rôle dans cet ouvrage poignant d’âpreté et de franchise. Où le journaliste, enquêteur empathique et scrupuleux, en vient à questionner l’origine de ses propres obsessions, en miroir de celles de l’athlète incarcéré. Son obsession pour le thème de la prison et la vie carcérale, déroulant alors le fil de sa propre histoire. Car dit-il : « Si j’expose ainsi Toumany Coulibaly, pourquoi je m’épargnerais moi-même la même mise à nu ? »
LA QUESTION DE L’ENFERMEMENT. À 20 ans, Mathieu Palain abandonnait son rêve fou de faire carrière en tant que footballeur professionnel pour devenir journaliste. Et la prison de devenir un sujet récurrent de reportages et d’enquêtes. Ayant côtoyé de près le sujet dans son adolescence (une jeune militante indépendantiste basque, fille d’amis très proches de ses parents, avait était condamnée à trente ans de prison pour terrorisme alors que lui-même avait 12 ans), il en a fait une quête très personnelle, incontournable. En France, aux États-Unis, pour le quotidien Libération, pour la revue XXI, il a rencontré des détenus, dépeint les conditions carcérales, s’est interrogé sur la justice et le destin : « Pourquoi certains s’en sortent et d’autres pas ? » Telle est la question qui n’a pas fini de le hanter.
Auteur(s) :
Mathieu Palain
Titre original :
Ne t'arrête pas de courir
Date de publication originale :
2021
Éditeur :
L'iconoclaste
Autres :
Prix du Roman des étudiants France Culture Télérama Prix Interallié 2021
Sale gosse (2019). Edition L’Iconoclaste. Le premier romain de Mathieu Palain. L’histoire bouleversante d’un gamin né du mauvais côté de la vie et de son éducatrice. D’une plume hyper-réaliste, Mathieu Palain signe un roman percutant. Il nous plonge dans le quotidien de ces héros anonymes et raconte avec empathie une histoire d’aujourd’hui, vraie, urbaine, bouleversante d’humanité.
L’écouter sur France Culture : quand Olivia Gesbert reçoit l’écrivain et journaliste Mathieu Palain, lauréat Prix du Roman des étudiants France Culture Télérama pour Ne t’arrête pas de courir (L’Iconoclaste)
Journaliste, il est notamment l’auteur de la série sur les violences conjugales Des hommes violents sur France Culture.
L’Adversaire (1998, POL). Roman d’Emmanuel Carrère. D’après l’affaire Jean-Claude Romand. Un tournant dans la production littéraire de Carrère qui, depuis, n’a pas écrit d’œuvres fictionnelles. Une essentielle dans la production de l’écrivain, le succès critique et populaire ne s’étant jamais démenti. Adapté au cinéma en 2002 par Nicole Garcia.
L’inconnu de la poste (2021, L’Olivier). Roman de Florence Aubenas. Une minutieuse enquête sur un crime réel et mystérieux mettant en scène un acteur marginalisé et une postière maniaco-dépressive, racontée comme un polar.